Si vous connaissez un petit peu Mijuin, vous savez que pour nous le lin c’est une grande histoire d’amour. On a décidé de revaloriser cette fibre textile qu’on a souvent eu tendance à mettre de côté, et à exporter un peu partout dans le monde. Parce que finalement, le lin, c’est une plante qui pousse tout près de chez nous, en Normandie, et qui offre de nombreux avantages à la fois écologiques et techniques.  

En allant à votre rencontre lors de salons, marchés et autres événements, on s'est aperçu que peu d'entre vous connaissez vraiment le lin, son histoire, et ses étapes de transformation. Alors, on a décidé d'écrire cet article pour tout vous expliquer. Et si vous avez des questions ou des remarques, n'hésitez pas à nous écrire !

L'histoire du lin : de son origine à aujourd’hui

Le lin c’est l'une des fibres textiles les plus anciennes et les plus polyvalentes au monde, que l’on cultive et utilise depuis des milliers d'années pour la fabrication d’une variété de produits, allant des vêtements de luxe aux matériaux de construction. 

Cultivée depuis des millénaires, le lin a marqué l’histoire. D’ailleurs, le lin a certainement été l’une des toutes premières fibres utilisées par les hommes. Cette utilisation remonte à des milliers d’années et notamment lorsque cette fibre a commencé à se développer en Égypte sous l’empire des Pharaons. A cette période, les Egyptiens attribuaient une grande valeur symbolique au lin, le considérant comme un symbole de pureté. Ils l'utilisaient d'ailleurs pour fabriquer leurs vêtements de culte, et les momies étaient enveloppées de bandelettes de ce matériau précieux !

Au fil des siècles et des époques, le culture du lin s'est développée en Europe, notamment en France (Bretagne, Paris, Normandie), en Angleterre, à Rome et en Irlande. Cependant, sa popularité a connu des hauts et des bas au fil du temps.

Sous l'ère de Charlemagne, le lin gagne en popularité et son artisanat commence à se développer. Entre le 9ème et 18ème siècle, le lin devient la fibre la plus utilisée et cultivée en France. Néanmoins, malgré l’invention de la machine à égrener le lin, qui permet de faciliter la production des fibres, cette dernière resta principalement artisanale pendant de nombreuses années. En parallèle, l’industrie du coton, elle, se mécanise et prend peu à peu le pas sur le lin, qui est devenu trop coûteux. Toutefois, cette tendance s’inverse après les deux guerres mondiales, lorsque la culture du lin est relancée. Les agriculteurs commencent à cultiver le lin sur les terres le long de la Manche. En effet, ce sont des zones propices à la production du lin grâce à leur climat pluvieux et parfois ensoleillé, apportant alors les conditions idéales pour la bonne culture de la plante.

Au fil des siècles, la production du lin s'industrialise mais reste très coûteuse, ce qui pousse les industriels à exporter leur production. À partir de 1976 et jusqu'à la fin des années 90, la filière a connu une série de fermetures successives, entrainant la disparition des 50 filatures encore présentes ! En effet, la filature du lin nécessitait 10 fois plus de main-d'œuvre que celle du coton, rendant l'équilibre économique insoutenable pour les entreprises.

De nos jours, près de vingt ans plus tard, ces filatures commencent à réapparaître progressivement
dans l'hexagone, redynamisant ainsi l'ensemble de l'écosystème local des tisseurs, des confectionneurs, etc.

Aujourd'hui, la culture du lin couvre une superficie de 75 000 ha en Europe, dont la moitié se trouve en Normandie, région qui fournit également 85% des débouchés mondiaux. Cette culture est très écologique, nécessitant peu d'eau et de pesticides, ce qui en fait une matière très intéressante sur le plan environnemental, tout comme le chanvre.

Le lin ne se limite plus seulement à la fabrication de vêtements et de linge de maison. Grâce à ses excellentes propriétés techniques, il est également utilisé dans la fabrication de composites, d'isolants, de papeterie et même en tant que graines pour l'alimentation.

Les étapes de transformation du lin

Maintenant que vous connaissez un petit peu plus l’histoire du lin, vous vous demandez peut-être comment il est transformé pour devenir le rideau de votre salon ou votre super veste Mijuin ? Eh bien, on va vous expliquer tout ça à l’aide d’un petit jeu qu’on a mis en place et qu’on utilise souvent pendant des salons : la fresque du lin !

Vous pouvez aussi vous référer au blog ci-dessous, qui racontent toutes les étapes de transformation du lin et la rencontre (filmée) avec certains acteurs de la filière du lin.

L’AGRICULTEUR ET LA RÉCOLTE

La toute première étape (qui semble un peu logique n’est-ce pas) concerne la culture et la récolte du lin.   

Saviez-vous que les agriculteurs font de notre pays le premier producteur mondial de lin ? Chaque année, entre mars et avril, ils sèment les graines de lin. Environ 100 jours plus tard, à la mi-juin (jolie date 😉), les tiges des champs s’ornent de fleurs bleues : pendant une semaine les champs deviennent bleus les matins et les fleurs fanent les après-midi. Puis, le lin croît rapidement
pour atteindre 1 mètre.

Une fois arrivées à maturité, vers la mi-juillet, les tiges de lin sont arrachées à l’aide de machines, puis laissées sur le champ où elles ont été arrachées. Le lin va rester au sol entre 3 semaines et 3 mois selon les conditions météorologiques pour être balayée par la pluie, le soleil et la brise. Cette étape, appelée le rouissage, permet de séparer les fibres entre elles grâce à l'apparition de micro-organismes. L'étape est cruciale puisqu'elle permet de déterminer la qualité du lin.

Champs de lin français

Une fois le rouissage effectué, le liniculteur va ainsi enrouler en balles les pailles puis les envoyer au teillage.

En France, la culture du lin bio est également présente et se développe petit à petit. Cependant, cela suscite encore de nombreuses interrogations et exige un changement de modèle pour de nombreuses marques et industries pour pouvoir utiliser cette production et ainsi l'étendre. On vous propose d'ailleurs bientôt un article là-dessus !

Pour en savoir plus sur l'étape de la récolte, découvrez l'article complet dans lequel Pauline part à la rencontre d’Éric, agriculteur dans l’Eure.

LE TEILLAGE

Après l’étape de récolte arrive l’étape de teillage.  

Le teillage est l'étape de séparation des fibres du bois de la plante. En effet, les fibres du lin sont contenues dans l’enveloppe externe de la tige, communément appelée « paille ». Pour pouvoir les exploiter, il est nécessaire de les extraire et de les débarrasser du bois présent au centre de la tige. Pour cela, les pailles vont passer par des dizaines de machines pour en extraire chaque composant.

Le préparateur place tout d’abord la balle de lin sur une table qui ensuite passe aux mains de l’étaleur qui se charge de bien placer les tiges de façon homogène avant qu’elles n'entrent dans les machines. Ensuite la tige passe par les broyeurs et batteurs qui se chargent de séparer la fibre de lin du bois. Ces opérations permettent aussi la séparation de la fibre courte de la fibre longue.  Ce qui va réellement intéresser le teilleur, ce sont les fibres longues.

Il faut savoir qu’une majorité de ces fibres ensuite extraites vont être exportées directement vers l’Asie pour procéder au peignage. Une minorité est peignée dans les teillages locaux.

Peignage de lin en france

Le peignage, c’est un procédé mécanique (sans chimique) qui consiste à peigner les fibres longues afin d’en retirer les impuretés et obtenir des fibres lisses et brillantes (comme la chevelure de Raiponce !).

Cette étape permet également d'obtenir des rubans puis des mèches, ce qui facilite la transition vers la prochaine étape : la filature.

Pour en savoir plus sur l'étape
du teillage, découvrez l'épisode 2 du Carnet de rencontres.

Épisode 2 : le teillage

LA FILATURE

La filature arrive en troisième étape de transformation.  

Ces dernières années toutes les fibres de lin étaient exportées pour être filées parfois en Europe mais pour la plupart en Asie. Début 2020, l’entreprise Emanuel Lang a relocalisé son activité de filature dans le Haut-Rhin. Milieu de l’année 2022, deux nouvelles filatures ont suivi : Safilin, dans le Pas-de-Calais, et Natup, dans l’Eure ! C’est d’ailleurs grâce à la relocalisation de ces filatures, et notamment Emanuel Lang, que Mijuin est né. Ça a réellement été l’opportunité pour (re)faire de la filière du lin, une pionnière du textile en circuit court.  

Il existe 2 procédés pour obtenir le fil de lin, chacun présentant des applications spécifiques. La filature à sec, méthode employée pour les fibres courtes, permet de produire des gros fils utilisés par exemple pour des vestes ou des sacs. La filature mouillée, exploitée pour les fibres longues, permet elle d'obtenir des fils fins et réguliers qui seront utilisés pour des chemises, des t-shirts ou encore des draps. Son procédé consiste à tremper les mèches dans de l'eau chaude pour que les fibres glissent les unes sur les autres.

Filature de lin française

Pendant la filature, les fibres peignées préalablement sont ensuite filées pour obtenir... des fils, oui ! Autrefois, la filature s’effectuait à la main, aujourd’hui, heureusement, elle est réalisée par des machines. 

Pour en savoir plus sur l'étape de la filature, découvrez l'épisode 3 du Carnet de rencontres.

Épisode 3 : la filature

LE TISSAGE ET LE TRICOTAGE

Certains comme Emanuel Lang, Lemaitre Demeestere, ou le Tissage du Ronchay ont résisté à l’appel de la délocalisation, et ont su conserver un savoir-faire exceptionnel mêlant tradition, modernité et passion. Chez eux, de grandes machines à tisser s’affairent dans un bruit constant à la réalisation de tissus de grande qualité. 

Pour passer d'un fil à une étoffe, deux savoir-faire existent : le tissage ou le tricotage.

  • Le tissage implique l’entrelacement de fils de chaîne et de fils de trame. Les fils de chaîne sont maintenus en place sur le métier à tisser tandis que les fils de trame sont tissés à travers les fils de chaîne.
  • Le tricotage, en revanche, implique la formation de boucles de fils. Les boucles sont enfilées les unes dans les autres pour créer le tissu final.

Un tricot (aussi appelée maille) aura une élasticité plus importante et donnera des pulls ou des t-shirts. Un tissu (aussi appelé chaine et trame) aura une souplesse moindre et permettra surtout de créer du linge de maison, des jeans ou des sacs.  

  • Tissage lin français

    LE TISSAGE

  • Tricotage lin français

    LE TRICOTAGE

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Lorsque le lin est tissé ou tricoté, il peut parfois passer au processus d’ennoblissement. Ce procédé se caractérise généralement par la teinture du tissu, teinture pouvant être végétale.

Pour en savoir plus sur l'étape du tissage, découvrez l'épisode 4 du Carnet de rencontres.

LA CONFECTION

En toute dernière étape, on retrouve la confection.  

Nous y voilà : le cœur de métier de Mijuin ! Ici on reçoit des rouleaux de tissus, à partir desquels on réalise les découpes grâce à des patrons (parfois papier mais de plus en plus souvent digitaux). Ensuite place au montage, où les couturier(e)s assemblent les morceaux avec différentes machines à coudres. 

Les coutures d’un vêtement sont généralement un bon indicateur de sa qualité. Bien souvent, l’acheteur lambda n’y prête pas attention et certains fabricants préfèrent économiser sur cette étape, pourtant importante. En effet, la qualité des coutures permet au produit de durer dans le temps, tout en conservant sa forme. 

Mijuin, atelier de confection consacré au lin français, en circuit court

Chez Mijuin, on travaille pour le moment uniquement sur du chaine et trame et pour confectionner des sacs, des vestes, des chemises, des tabliers et on vous propose même le tissu au mètre, de quoi vous faire plaisir et exprimer votre créativité.

Je découvre la confection

L’avenir du lin

Le lin est, et ce depuis des années, considéré comme l’un des matériaux les plus durables et écologiques dans l’industrie textile. Aujourd’hui, la conscience des consommateurs sur une consommation plus responsable s’éveille et prend réellement de l’importance quant aux enjeux actuels de réchauffement climatique. Les français désirent de plus en plus des produits naturels et durables. En plus, avec une culture pauvre en eau et en pesticides, le lin vient cocher toutes les cases et participe à réduire l’impact environnemental du secteur textile. 

Historiquement, nous l’avons vu, le lin était utilisé pour les vêtements mais également pour des toiles de voile, des cordages de bateaux ou des bandages. Aujourd’hui, cela a beaucoup évolué puisque le lin s’utilise possède de multiples applications notamment dans la fabrication de linge de maison, de tissus d’ameublement, de matériaux de construction, de produits alimentaires et même de cosmétiques. En plus, les avancées technologiques et la recherche et développement sur le lin peuvent amener à créer de nouveaux tissus adaptés à diverses utilisations en créant des mélanges de lin et d’autres matériaux (par exemple des mélanges de coton / lin).  

En tout cas, ce que l’on sait aujourd’hui, c’est que l’avenir du lin est prometteur. Il répond à de nombreux enjeux et demandes de la part des consommateurs et on est persuadé que les innovations autour de la filière du lin vont prendre de plus en plus d’intérêt dans notre société.  

On espère que cet article vous aura apporté les réponses à vos questions ou tout simplement vous aura fait connaître le lin et sa filière. Si vous avez des interrogations, n’hésitez surtout pas à nous écrire.  

À très bientôt !